dimanche 24 mai 2015

Lettre aux Italiens et aux Gaules

A l'occasion du Dimanche des Pères du Concile Œcuménique de Nicée (325), nous souhaitions rappeler cette lettre synodale, classé parmi les lettres de saint Basile le grand au numéro 92, et datée de 372, soit une dizaine d'année avant le second concile œcuménique (Constantinople 381) que nous avons justement commémoré cette semaine (22 mai). Cette lettre synodale appel à l'aide les évêques d'Italie et des Gaules face au ravage de l'arianisme en Orient.


Aux Italiens et aux Gaules
lettre 92 de saint Basile le Grand, anno 372.

1. A nos très pieux et saint frères qui servent en Italie et en Gaule, évêques avec nous unis en esprit, nous, Meletius d'Antioche, Eusebius de Samosate, Basile de Césarée, Bassus d'Edesse, Grégoire de Nazianze l'Ancien, Pelagius de Laodicée, Paul, Anthime de Tyana, Theodotus de Nicopolis, Bithus (Vitus) de Carrhae, Abraamius de Batnae, Jobinus, Zénon de Tyre, Theodoretus, Marcianus, Barachus, Abraamius d'Urimi en Syrie, Libanius, Thalassius, Joseph, Boethus, Iatrius, Theodotus, Eustathe de Sébaste, Barsumas, Jean, Chosroes, Iosaces d'Arménie Majeure, Narses, Maris, Grégoire de Nysse, et Daphnus, nous adressons nos salutations dans le Seigneur.
Les âmes dans l'angoisse cherchent quelque consolation en laissant soupir après soupir remonter du fond du coeur, et même une larme versée brise la force de l'affliction. Mais soupirs et larmes nous apportent moins de consolation que l'opportunité d'exprimer nos épreuves à votre charité. De plus, nous sommes encouragés par l'espoir encore plus fort que si d'aventure, nous vous exposons nos épreuves, nous pourrions vous amener à nous apporter le secours que nous espérons depuis si longtemps que vous donneriez aux Églises en Orient, mais que nous n'avons pas encore reçu; Dieu, Qui dans Sa sagesse arrange toutes choses, doit avoir ordonné d'après les jugements cachés de Sa justice, que nous devrions être éprouvés encore plus longtemps par ces tentations.
Le récit de notre condition est parvenu aux confins de la terre, et vous ne l'ignorez nullement; pas plus que vous n'êtes sans compassion pour les frères de même esprit que vous, car vous êtes disciples des Apôtres, qui nous enseignent que l'amour de notre prochain, tel est l'accomplissement de la Loi (cf. Rom. 13,10). Mais, comme nous l'avons dit, le juste jugement de Dieu, qui a ordonné que l'affliction méritée par nos péchés soit comblée, vous a retenus. Mais lorsque vous aurez apprit tout, en particulier tout ce qui jusqu'alors n'était pas parvenu à vos oreilles, par notre révérend frère le diacre Sabinus, qui sera à même de vous narrer en personne ce qui est omis dans cette lettre, nous vous supplions de vous lever tant par zèle pour la vérité que par compassion envers nous. Nous vous implorons de vous revêtir de profonde miséricorde, de laisser de côté toute hésitation, et d'entreprendre l'oeuvre de l'amour, sans envisager la longueur du chemin, vos propres occupations, ou tout autre intérêt humain.

2. Ce n'est pas seulement une Église [locale] qui est en péril, ni 2 ou 3 qui seraient tombées dans cette terrible tempête. Le trouble de cette hérésie se répand presque depuis les frontières de l'Illyrie jusqu'à la Thébaïde. Ses mauvaises semences furent d'abord semées par l'infâme Arius; elles se sont ensuite profondément enracinées par les oeuvres de nombreux qui ont vigoureusement cultivé l'impiété entre son époque et la nôtre. A présent, elles ont produit leur fruit mortel. Les doctrines de la vraie religion sont foulées aux pieds. Les lois de l'Église sont dans la confusion. L'ambition d'hommes, qui ne craignent pas Dieu, se précipitent aux plus hautes positions et rangs élevés est à présent publiquement connue comme étant le prix de l'impiété. Il en résulte qu'au plus l'homme blasphème, au plus les gens le trouvent digne d'être évêque. La dignité cléricale est une chose du passé. Il y a un manque total d'hommes érudits pour veiller sur le troupeau du Seigneur. Des hommes ambitieux ne cessent de dilapider les biens destinés aux pauvres, en faisant leur propre jouissance, et les utilisant pour faire des cadeaux. Il n'y a plus de connaissance précise des Canons. Il y a immunité complète pour le péché; quand des hommes ont été placés à un poste par la faveur d'autres, en retour, ils sont obligés de sans cesse montrer de l'indulgence pour les offenseurs. Le juste jugement appartient au passé; et chacun s'en va suivant les désirs de son propre coeur. Le vice ne connaît plus de limites; les gens ne se retiennent plus de rien. Les hommes qui ont autorité ont peur de s'exprimer, car ceux qui ont atteint le pouvoir par collusion sont les esclaves de ceux à qui ils doivent leur avancement. Et à présent, même l'apologie de l'Orthodoxie est regardée par certains partis comme une opportunité pour des attaques mutuelles; et les hommes cachent leurs basses intentions et prétendent que leur hostilité est pour le bien de la vérité. D'autres, redoutant d'être convaincus de crimes odieux, ont rendu le peuple fou jusqu'à entrer en querelles fratricides, de sorte que leurs propres méfaits puissent ne pas être remarqués dans la confusion généralisée. D'où les guerres n'acceptent nulle trêve, car les auteurs d'actions mauvaises ont peur de la paix, la redoutant car elle permettrait de dévoiler leur secrète infamie. Les incroyants rigolent; les hésitants dans la foi sont ébranlés; la foi est incertaine; les âmes sont imprégnées d'ignorance, car les adultères de la Parole imitent la vérité. Les bouches des vrais fidèles restent muettes, pendant que toute langue blasphématoire s'agite librement; les choses saintes sont foulées aux pieds; les meilleurs laïcs fuient les églises comme étant des écoles d'impiété; et ils élèvent leurs mains dans des déserts, avec soupirs et larmes, vers leur Seigneur qui est au Ciel. Même vous, vous avez dû entendre parler de ce qui advenait dans la plupart de nos villes, comment nos gens avec épouses et enfants et même nos vieillards en fuient les murs, et offrent leurs prières à l'air libre, supportant avec grande patience tous les inconvénients météorologiques, et attendant l'aide du Seigneur.

3. Quelle lamentation pourrait rencontrer ces malheurs? Quelle source de larmes pourrait leur suffire? Alors que certains semblent encore tenir bon, alors qu'une trace de l'ancien état des choses subsiste, avant que l'ultime naufrage ne frappe l'Église, hâtez-vous de venir à nous, hâtez-vous maintenant, frères véritables, nous vous en implorons; à genoux, nous vous implorons, étendez une main secourable. Puissent vos fraternelles entrailles être bouleversées face à ce que nous subissons; ne regardez pas, indifférents, la moitié de l'empire être dévorée par l'erreur; ne laissez pas la lumière de la Foi s'éteindre là où elle brilla pour la première fois.
Par quelle action vous pourriez aider, et comment vous pourriez montrer votre compassion envers les affligés, vous ne voudriez pas que nous vous l'exprimions; le Saint Esprit vous le suggérera. Mais incontestablement, si il faut que les survivants soient sauvés, prompte action est requise, ainsi que l'arrivée d'un nombre considérable de frères, de sorte que ceux qui nous visitent puissent compléter le nombre de présents au Synode, afin que nous puissions être en nombre pour effectuer une réforme, non simplement de la dignité d'entre ceux dont ils sont les émissaires, mais aussi par le fait de leur propre nombre : ainsi ils restaureront le Credo tel qu'établit par nos Pères à Nicée, proscriront l'hérésie, et, amenant à un accord tous ceux qui sont un d'esprit, diront la paix aux Églises. Car la plus affligeante chose à propos de tout ce qui se passe, c'est que la partie saine est divisée contre elle-même, et les troubles que nous souffrons sont de la même teneur que ceux qui frappèrent autrefois Jérusalem lorsque Vespasien l'assiégea. Les Juifs de cette époque étaient à la fois assaillis par des ennemis et consommés par la sédition interne de leur propre peuple. Dans notre cas aussi, en plus des attaques ouvertes des hérétiques, les Églises sont réduites à l'extrême impuissance par la guerre qui sévit entre ceux qui sont supposés être Orthodoxes.
Pour toutes ces raisons, nous aspirons en effet après votre aide, de sorte qu'à l'avenir, tous ceux qui confessent la Foi apostolique puissent mettre un terme aux schismes qu'ils ont hélas causés, et soient apaisés pour le futur de l'autorité de l'Église; de sorte qu'à nouveau, le Corps du Christ puisse être complet, restauré dans l'intégrité avec tous ses membres. Ainsi nous ne louerons pas seulement les bénédictions des autres, ce qui est la seule chose que nous puissions faire pour l'instant, mais nous verrons nos propres Églises à nouveau restaurées dans leur immaculée splendeur d'Orthodoxie. Car, vraiment, l'avantage qui vous a été donné par le Seigneur est digne des plus hautes félicitations, votre capacité de discernement entre le fallacieux et l'authentique et pur, et votre prédication de la Foi des Pères sans la moindre dissimulation. Cette Foi que nous avons reçue; cette Fois que nous savons être marquée du sceau des Apôtres; à cette Foi, nous acquiesçons, de même qu'à tout ce qui a été canoniquement et légalement promulgué par la Lettre Synodale.

Source française : Saint Materne.

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