dimanche 14 janvier 2018

Archimandrite Placide (Deseille) : Mémoire Eternelle


Les funérailles du père Placide Deseille au monastère Saint-Antoine-le-Grand

Le 11 janvier ont eu lieu les funérailles de l’archimandrite Placide (Deseille) au monastère Saint-Antoine-le-Grand à Saint-Laurent-en-Royan, qui est le métochion du monastère athonite de Simonos Petras. Environ 300 personnes, clercs, moines, moniales et laïcs, ont participé à l’office des funérailles, présidées par le métropolite de France Emmanuel (Patriarcat œcuménique), assisté de l’archevêque de Telmessos Job (Patriarcat œcuménique), du métropolite Joseph d’Europe occidentale et méridionale (Patriarcat de Roumanie) et de l’évêque-vicaire Marc de Neamț (Patriarcat de Roumanie), ainsi que d’une trentaine de prêtres et diacres de différentes Églises locales orthodoxes. Avant l’office des funérailles a eu lieu la liturgie célébrée par Mgr Job. L’office même des funérailles a duré environ trois heures. Le message de condoléances du patriarche œcuménique Bartholomée a été lu par le métropolite de France Emmanuel, lequel a prononcé ensuite une allocution dans laquelle il a évoqué les étapes importantes du défunt et sa contribution à la renaissance de l’orthodoxie et du monachisme contemporains. À son tour, l’archimandrite Élie, higoumène du monastère de la Transfiguration à Terrasson, a prononcé l’éloge funèbre du père Placide au nom de la communauté monastique de Simonos Petras. Pendant le repas, l’évêque Marc a lu le message de condoléances du patriarche de Roumanie Daniel, dans lequel le primat a mentionné que le père Placide « était très proche de notre pays et de notre Église. Il a témoigné que c’est d’abord en Roumanie qu’il avait découvert ‘un peuple orthodoxe et une Église qui, malgré les persécutions les plus brutales, n’avaient pas cessé de garder vivante la foi en Christ par le sang des martyrs et le sacrifice de nombreux confesseurs, et où malgré les difficultés, la vie spirituelle était florissante autour de certains pères spirituels portant le feu du Saint-Esprit ».

L’archimandrite Placide (Deseille) est né à Issy-les-Moulineaux en 1926, au sein d’une famille très diverse : d’un côté très catholique, proche des milieux monastiques, d’un autre côté, anticléricale. Son premier « contact » avec l’orthodoxie eut lieu alors qu’il était âgé de douze ans, après avoir lu un reportage sur les monastères des Météores en Grèce. En 1942, à l’âge de seize ans, il entra au monastère cistercien de Bellefontaine. Dès cette époque, il étudia les Pères de l’Église, dont particulièrement saint Jean Cassien et saint Benoît. Cet attachement aux Pères, et la vie selon leurs préceptes, ne le quittèrent pas jusqu’à son trépas. Il reçut ensuite sa formation théologique supérieure à Rome. Dans les années cinquante, il fit la connaissance, à l’Institut Saint-Serge de Paris, de l’éminent patrologue qu’était l’archimandrite Cyprien Kern et qui l’initia à saint Grégoire de Nysse, saint Maxime le Confesseur et saint Grégoire Palamas. Il a rencontré également Vladimir Lossky, dont le livre « La théologie mystique de l’Église d’Orient » le marqua profondément, au point de le qualifier de « livre explosif ». Continuant son cheminement dans le monachisme catholique, il attendait, comme beaucoup, du concile Vatican II que celui-ci marque un véritable retour à la théologie et à la liturgie des Pères. Déçu, il pensait qu’en rejoignant le rite byzantin au sein de l’Église catholique-romaine, il trouverait une réponse à sa quête d’une vie fidèle aux préceptes des Pères. C’est ainsi qu’il fonda, avec un autre moine qui partageait ses préoccupations, un ermitage à Aubazine, en Corrèze, vivant dans une ascèse très stricte et célébrant les offices selon le rite byzantin. À cette époque, il fit de nombreux voyages dans le monde orthodoxe, en Roumanie, en Serbie, en Grèce, et particulièrement au Mont Athos. Il eut de nombreuses rencontres avec les grands spirituels de cette époque, notamment le père Cléopas (Ilie, +1998) en Roumanie, le père Justin (Popović +1979), en Serbie, les pères Païssios (+1994) et Éphrem de Katounakia (1988) sur le Mont Athos. Parvenu à la conclusion que l’Église orthodoxe était l’Église des Pères, il y fut reçu par l’archimandrite Aimilianos de Simonos Petras le 19 juin 1977. En février de l’année suivante, il devint moine de cette communauté et, sur le conseil du père Aimilianos, il revint en France, où il fonda d’abord le monastère Saint-Antoine-le-Grand à Saint-Laurent-en-Royans et plus tard le monastère de la Protection-de-la-Mère de Dieu à Solan. Outre son activité de père spirituel de ces monastères, le père Placide enseigna la patristique à l’Institut Saint-Serge de Paris et continua à développer son travail de publication et de traduction. Ancien membre du secrétariat de direction de la prestigieuse collection « Sources chrétiennes », il fut également le fondateur de la collection « Spiritualité orientale » de l’abbaye de Bellefontaine en 1966. En outre, il fut l’auteur de nombreux ouvrages et traductions (voir la liste ici).

Eglise du monastère st Antoine le grand

Ses traductions les plus importantes dans le domaine patristique sont l’Échelle de saint Jean Climaque, les Œuvres spirituelles de saint Macaire d’Égypte, et les Discours ascétiques de saint Isaac le Syrien. Dans le domaine liturgique, il faut citer son Psautier, traduit d’après la version grecque des Septante, qui est utilisé dans la plupart des paroisses orthodoxes francophones. Il fit également un grand nombre de conférences portant sur tous les domaines de la vie spirituelle.

Profondément attaché à la France, à ses saints anciens, sa langue qu’il maniait admirablement, et sa culture, il n’en était pas moins en communion profonde avec l’ensemble du monde orthodoxe, particulièrement les Grecs, les Roumains et les Serbes, mais aussi la Russie. S’il n’avait pu connaître celle-ci en raison du régime soviétique, il avait une profonde admiration pour son renouveau spirituel actuel, allant jusqu’à dire que ceux qui le niaient « péchaient contre le Saint-Esprit ».

À la veille de son trépas sont parues ses homélies en deux volumes intitulées La couronne de l’année chrétienne (éditions du monastère de Saint-Antoine-le-Grand), ainsi que De l’Orient à l’Occident. Orthodoxie et catholicisme (Éditions des Syrtes). Ce dernier ouvrage  contient son autobiographie complète et un certain nombre d’articles sur les différences, parfois certaines convergences, entre l’orthodoxie et le catholicisme. On peut dire que l’on y trouve le cheminement de ce grand spirituel de notre époque. Le père Placide est décédé le lendemain du jour de la Théophanie, fête qu’il aimait particulièrement, comme le révèlent les homélies qui viennent d’être publiées. Le monastère de Simonos Petras célèbre, le jour de la Nativité, ses bienheureux fondateurs. Prévenu peu avant l’office du trépas du père Placide, les moines de Simonos Petras l’ont donc commémoré avec les fondateurs. Que sa mémoire soit éternelle !

Source Orthodoxie.com d'après Afonit.

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Archimandrite Placide : Mémoire Éternelle

dimanche 7 janvier 2018

Liturgie orthodoxe à Paris en l’honneur de Sainte Geneviève


Dans la crypte de l’église « Saint Sulpice » à Paris a été célébré mercredi dernier l’acathiste et la sainte liturgie en l’honneur de sainte Geneviève. Elle est la deuxième protectrice de cette paroisse roumaine de Paris, fondée en 1998 avec la bénédiction du métropolite Joseph (Métropole orthodoxe roumaine d’Europe occidentale et méridionale). Étant donné que la fête de la sainte avait lieu un jour de semaine, la fête patronale solennelle aura lieu le dimanche suivant. Le recteur de la paroisse le père Răzvan Ionescu a expliqué que la cérémonie de ce jour est l’expression de la vénération de la communauté roumaine de Paris pour sainte Geneviève. « C’est une sainte extraordinaire, elle a investi toute sa vie dans l’abnégation, par l’ascèse rigoureuse, pour le service de l’autre » a déclaré le père
Răzvan Ionescu à l’Agence roumaine Basilica, ajoutant, au sujet de la sainte qu’elle avait reçu l’habit monastique à l’âge de quinze ans. Le père Răzvan a souligné l’amour des fidèles de sa paroisse pour sainte Geneviève, lesquelles rendent visite de temps à autre à la sainte, dont les reliques se trouvent en l’église Saint-Étienne-du-Mont. « Nous sentons sa protection et elle est, à côté de sainte Parascève [l’autre sainte patronne de la paroisse] un pont de sainteté qui relie les peuples roumain et français » a déclaré le père. En même temps, il a rappelé « l’agressivité de ceux qui ni ne cherchent, ni ne comprennent Dieu » car, en 1793, ses saintes reliques ont été presque entièrement brûlées et jetées dans la Seine, tandis que l’église où elles se trouvaient a été transformée dans le Panthéon actuel. « Dans notre communauté, nous sentons d’une manière absolument évidente sa présence. Je fais allusion à nos vies, à chaque fidèle qui la cherche dans la prière » a-t-il précisé. Les premiers prêtres qui ont servi dans la communauté placée sous la protection de sainte Parascève et sainte Geneviève ont été le père Raphaël Noica et, plus tard, l’un de ses disciples, le père Cyprien, actuel évêque orthodoxe roumain en Italie. En 2002, le père Răzvan Ionescu a été nommé recteur. La chapelle de la communauté est hébergée dans la crypte Saint-François de l’église Saint-Sulpice. Les fidèles de la paroisse souhaitent construire une église byzantine, qui sera le futur lieu de culte de la communauté. Actuellement, à côté des Roumains, un certain nombre de Français orthodoxes participent aux offices.

Source : Orthodoxie.com

jeudi 4 janvier 2018

Paris : pèlerinage annuel au tombeau de sainte Geneviève


La paroisse Notre-Dame-Joie-des-Affligés-et-sainte-Geneviève, comme tous les ans, organise un pèlerinage samedi 6 janvier à 16h30 auprès du tombeau de sainte Geneviève de Paris dans l’église Saint-Etienne-du-Mont (carte). Un office sera célébré, puis aura lieu une vénération de l’icône et des reliques de la sainte patronne de la capitale.

lundi 1 janvier 2018

De l'Orient à l'Occident - Père Placide Deseille

Une recension de J.C. Larchet du dernier ouvrage du R.P. Placide Deseille. Ouvrage qui rassemble les nombreux fascicule écrit par l'auteur, dont nous avions déjà évoqué à quelques reprises l'existence.


Père Placide Deseille, « De l’Orient à l’Occident. Orthodoxie et catholicisme », Avant-propos de Bernard Le Caro, Éditions des Syrtes, Genève, 2017, 348 p.

C’est une excellente idée d’avoir rassemblé, dans ce volume, les riches études de l’Archimandrite Placide Deseille, qui datent pour beaucoup d’entre elles de l’époque déjà ancienne où il donnait des conférences régulières et très suivies à Montgeron, mais qui après des années passées n’ont pas pris une ride. Ces textes avaient été publiés sous forme de fascicules par son monastère, et de ce fait n’avaient pas connu toute la diffusion qu’ils méritaient. Le fait de les réunir permet des les avoir tous, mais aussi et surtout de monter un ensemble cohérent, consacré pour l’essentiel à une réflexion historique, théologique et spirituelle sur les rapports entre l’Orient et l’Occident chrétiens avant et après le schisme. Il s’agit plus précisément de montrer comment et pourquoi le christianisme occidental s’est progressivement éloigné du christianisme oriental, le catholicisme-romain se montrant sur certaines points en rupture totale avec l’Orthodoxie, mais conservant, sur d’autres points, des éléments de leurs racines communes, l’Orthodoxie, de son côté, gardant des liens forts avec les saints occidentaux du premier millénaire et assumant parfaitement ce qui, dans la tradition latine du premier millénaire, était en plein accord avec la tradition orthodoxe. Les dix-sept études qui composent le recueil peuvent être réparties en deux parties. Dans une première partie, le Père Placide montre comment l’Occident a été évangélisé à partir de l’Orient, comment le monachisme occidental a pris ses sources dans le monachisme des déserts d’Égypte et en a été profondément imprégné (dans la tradition bénédictine notamment), puis comment des points de rupture sont apparus déjà avec la théologie de saint Augustin, avant que ne se produise une déchirure entre ce qui devint le catholicisme-romain et l’Orthodoxie. Les différences puis les divergences se sont étendues à la spiritualité, mais certaines convergences ont cependant subsisté, et on en voit bien des éléments encore chez Pascal et les « Messieurs de Port-Royal », grands amateurs de la spiritualité des Pères grecs qu’ils ont édités, et jusqu’à nos jours dans les ordres monastiques les plus anciens, comme celui qui suit toujours la règle de saint Benoît. Dans une deuxième partie, l’auteur envisage surtout les rapports de l’Europe avec l’Orthodoxie à l’époque moderne et les questions liées à la diaspora, à l’uniatisme et à l’œcuménisme. L’ouvrage se conclut sur une réflexion sur la façon d’être chrétien orthodoxe aujourd’hui et sur la formulation de quelques exigences de la vie chrétienne.
La compétence particulière du Père Placide Deseille pour analyser les divergences et les convergences (statiques et dynamiques) entre l’Orient et l’Occident chrétiens du premier millénaire, puis entre l’Orthodoxie et le catholicisme-romain tient à sa formation bivalente et à son itinéraire personnel, exposés dans l’autobiographie qui ouvre le volume, avec : sa naissance en 1925, sa première formation au sein du catholicisme, la révélation précoce de sa vocation religieuse, son entrée dans le monachisme à l’âge de 16 ans en 1942, sa formation, sa vie et ses activités au sein du monachisme cistercien (où il fut notamment maître des novices, développa un secteur sur le monachisme et occidental dans le cadre de la collection « Sources chrétiennes », fonda la collection « Spiritualité orientale » aux éditions de Bellefontaine), la fondation d’une communauté de rite byzantin à Aubazine en 1966, puis la crise suscitée par le concile Vatican II, sa découverte progressive (déjà avant cette époque) de l’Église orthodoxe et de quelques-uns des ses grands spirituels au cours de pèlerinages dans les pays orthodoxes, la prise de conscience que le rite byzantin n’était au sein du catholicisme qu’un pauvre ersatz auquel manquait l’essentiel (voir sur ce point son précédent livre : Propos d’un moine orthodoxe), son entrée par le baptême dans l’Église orthodoxe en 1977, et sa fondation en France du monastère Saint-Antoine le Grand dans le Vercors et du monastère de Solan, deux métochia (dépendances) du monastère de Simonos-Pétra (Mont-Athos). Cette conversion du Père Placide et de sa communauté française ne fut pas une expatriation ni un exil, ni même une acculturation : il ne fit par là que retrouver les racines profondes de l’Occident latin et de la France, le christianisme de leurs origines, comme il l’explique dans les dernières lignes de cette autobiographie :
« Un vieux moine de la Sainte Montagne maintenant décédé, le père Gélasios de Simonos-Pétra, nous avait dit un jour : “Vous n’êtes pas des catholiques romains convertis à l’Orthodoxie grecque. Vous êtes des chrétiens d’Occident, des membres de l’Église de Rome, qui rentrez en communion avec l’Église universelle. C’est beaucoup plus grand et beaucoup plus important.” Et, tandis qu’il disait cela, de grosses larmes coulaient sur ses joues… Certes, nous nous sommes bien “convertis”, en ce sens que nous sommes passés de l’Église romaine – envers laquelle nous gardons une immense gratitude pour tout ce que nous avons reçu au sein de nos familles et de ce peuple chrétien qui nous a si longtemps portés – à l’Église orthodoxe. Mais cette Église orthodoxe n’est pas une Église “orientale”, une expression orientale de la foi chrétienne : elle est l’Église du Christ. Sa tradition fut la tradition commune de tous les chrétiens pendant les premiers siècles, et en entrant en communion avec elle, nous ne faisions que revenir à cette source. Nous n’avons pas “changé d’Église” : nous n’avons fait que rentrer dans la plénitude de l’unique Église du Christ. »
Bien documentée mais sans faire étalage d’érudition, claire et pédagogique, vivante (pour être issue de conférences), très équilibrée et nuancée dans ses jugements, et nourrie d’une longue et riche expérience personnelle, cette série d’analyses est indispensable à tous les Orthodoxes vivant en Occident, à tous les Occidentaux s’intéressant à leurs racines chrétiennes les plus profondes et les plus authentiques, et à tous ceux qui souhaitent comprendre, sans aveuglement, compromis ou exagérations de mauvais aloi, ce qui distingue, sépare ou rapproche le catholicisme romain et l’Orthodoxie tant dans leur théologie que dans leur spiritualité et leur mentalité.

Jean-Claude Larchet
Orthodoxie.com