samedi 13 juin 2015

Archimandrite Denis (Chambault)


Le 22 Mai dernier à l'église des Trois-Saints-Docteurs à Paris, s'est tenue une conférence-débat consacrée au 50e anniversaire du repos dans le Seigneur de l'Archimandrite Denis (dans le monde Lucien Chambault, 1899 - 3 mai 1965). L'archimandrite Denis converti à l'Orthodoxie en  1937 et devenu moine en 1944 avec le nom de Denis, était un moine orthodoxe suivant la règle de saint-Benoît et célébrant la messe dans le rite occidental.


A notre tour, afin de rappeler la mémoire de ce vénérable pasteur qu'était le père Denis, nous vous reprenons un article originellement paru dans la revue Church Times (July 21, 1961), et traduit de l'anglais et publié en français sur le blog Saint-Materne.





Le Pouvoir de la Prière

Par Serge Bolshakoff

A Paris, dans une rue étroite et relativement bruyante, près de la station de métro Vaugirard, il y a au 26 rue d'Alleray une maison d'apparence modeste. Cependant, cette simple maison accueille beaucoup de visiteurs. Des gens y viennent de tout Paris et d'ailleurs pour être guéris par la prière. Ils y sont envoyés par le clergé de même que par des médecins spécialistes quand toute autre méthode a échoué. La majorité des visiteurs sont affectés de troubles mentaux et nerveux.

La paroisse de l’Ascension, de rite occidental, est transférée, en 1945, du 72 rue de Sèvres, dans le 7ième arrondissement, au 29 rue d’Alleray, dans le 15ième, où le père Denis installe son monastère Saint Denis et saint Séraphin.

J'ai visité plusieurs fois cette maison. La porte de façade s'ouvre sur un corridor paisible et tranquille. La petite chapelle, où les services de guérison ont lieu, est juste à côté. Nombre de lampes votives et de cierges y brûlent. La chapelle est petite, humble, sans prétention, mais il y règne une atmosphère particulière de repos et d'espérance. Derrière la maison, on trouve un charmant petit jardin. Bien que la maison soit située dans un quartier bruyant et fortement peuplé, il est très calme.

Cette petite maison me rappelle toujours un autre lieu – la grandiose abbaye Bénédictine de Silos, en Espagne. Cette grande abbaye s'élève dans les plaines brûlées par le soleil et desséchées de Vieille Castille. Dans la chaleur et le soleil éblouissant, la poussière et la soif assaillent le voyageur. Dans l'abbaye, en particulier dans son patio, entouré d'un des plus célèbres cloîtres au monde, il fait frais, agréable, paisible. Les fontaines font jaillir leur eau au milieu d'une magnifique verdure et des fleurs. Les oiseaux chantent. L'abbaye est comme un château intérieur de l'âme. Dehors, c'est le monde – passions, péché, tristesse – alors qu'au dedans de l'âme d'un mystique, il y a une joie radieuse et la paix, parce que Dieu y est.

Tout comme Silos, la petite maison de la rue d'Alleray est une oasis de paix et de joie au cœur d'une grande capitale où les âmes souffrent de troubles, péché et tristesse, habituels des grandes cités. De plus, aussi, c'est un établissement Bénédictin. C'est le Prieuré des Bénédictins Orthodoxes de Rite Occidental et il est sous la juridiction du Patriarcat de Moscou. Une paroisse est attachée au Prieuré. Il y a à présent quelques congrégations Orthodoxes de Rite Occidental en Pologne, France, et même en Italie. Originellement, elles formaient de petites congrégations indépendantes, vaguement appelées Vieux Catholiques, Evangéliques Catholiques, et ainsi de suite. Il y a beaucoup de groupes semblables, tant en Europe qu'en Amérique. Leur histoire est souvent compliquée et longue.

Le père Denis, en 1944, devenu moine bénédictin orthodoxe, avec ses deux disciples, le père Georges Lamothe et le père Jean Péterfalvi.


Dans le passé, un certain nombre de groupes semblables se sont approchés des autorités de l'Eglise Orthodoxe avec une demande pour être reçus dans l'Eglise Orthodoxe. Dans certains cas, la demande était accordée. Les demandeurs étaient d'accord d'accepter la Foi Orthodoxe et le Rite Byzantin. Il y a plusieurs paroisses Orthodoxes de ce type en Amérique, et une Église Orthodoxe florissante en Afrique de l'Est, principalement en Ouganda. Quelques congrégations ont été autorisées à continuer d'utiliser le Rite Occidental. Déjà en 1870, le Saint-Synode de Russie avait permit l'usage de la Messe Romaine avec quelques changements. L'Usage d'Alleray avait été approuvé dans les années 1930 par le Synode de Moscou.

Une célébration du rite occidental (de la version de l’office orthodoxe occidental, inspirée par l’office
bénédictin et composée par le père Denis) dans l’église de l’Ascension, rue d’Alleray.

Le père Denis Chambault, supérieur du Prieuré d'Alleray et auparavant journaliste, devint un guérisseur reconnu il y a une quinzaine d'années d'ici, en assistant feu le père Joseph Cirel, qui possédait un remarquable pouvoir de guérison. Il n'y a rien d'ésotérique ou d'étrange dans les services de guérison à la chapelle. Les prières ordinaires prescrites par le Rite Latin sont utilisées. Le don de guérison est en effet un charisme [charisma = don], mais il est donné aux gens d'après leur foi. Rien de plus n'est requis. Le p. Chambault est un homme d'une soixantaine d'années, paisible, réservé mais amical.

Généralement, ceux qui veulent faire appel à ses services de guérison prennent un rendez-vous avec lui. Le service de guérison est précédé d'un long entretien avec le patient. Il peut y avoir plusieurs entretiens. Les patients Orthodoxes font habituellement leur confession, bien que cela ne soit pas requis pour les autres. Quand le moment est approprié, le service de guérison a lieu dans la chapelle.

Les résultats sont souvent surprenants, et le nombre de visiteurs grandit avec le temps. Bien entendu, il n'y a pas de paiement, bien que ceux qui sont guéris font en général un don. L'expérience du Prieuré montre pleinement la puissance de guérison étonnante de la prière. Nos contemporains négligent de faire appel à cette puissance parce que notre foi est faible. Nul ne possède de puissance de guérison à moins d'avoir une foi à déplacer les montagnes.

En plus d'être un centre de guérison et d'administrer une paroisse, le Prieuré d'Alleray travaille aussi pour promouvoir l'unité Chrétienne par la prière et la production littéraire. Il édite des bulletins réguliers en français et en anglais. Les Pères du Prieuré parlent aussi bien anglais que français. Le Prieuré est un endroit des plus inhabituels, et une conversation avec le p. Chambault est en elle-même une expérience.


samedi 6 juin 2015

Quelques repères chronologiques de la présence orthodoxe en France au second millénaire

1401 : L'Empereur romain ("byzantin") Manuel II Paléologue séjourne pendant un an à Paris lors d'une tournée occidentale cherchant des renforts contre les Ottomans. Il fait célébrer à la Sainte Chapelle la liturgie orthodoxe. Il écrit durant son séjour un gros volume sur La procession du Saint Esprit en réponse à un article d'un docteur de la Sorbonne sur le bien-fondé du Filioque.

1727 : première mention d'un prêtre orthodoxe à Paris, détaché auprès de l'ambassade de Russie.

1814 : Les troupes russes entre dans Paris quelques jours avant Pâques. Et le Dimanche 10 Avril, jour de Pâques (catholique-romain et orthodoxe cette année là) le Tsar Alexandre Ier fait célébrer Place de la Concorde à Paris un office de Te Deum à la mémoire du roi Louis XVI

1816 : une chapelle fonctionne depuis 1757 à l'ambassade russe à Paris, dont l'ambassadeur a demandé un prêtre permanent en 1738, desservant les fidèles orthodoxes de la capitale.
Une église dédiée à St Pierre et Paul fut d’abord créée dans des locaux loués (rue de Mesley puis rue de Berri) qui à l’évidence étaient trop exigus pour contenir tous les orthodoxes désireux de la fréquenter, la nécessité de disposer d’une église plus vaste située dans un bâtiment indépendant devenait criante.

1820 : première paroisse grecque, à Marseille ; inaugurée en 1845, l'église de la Dormition-de-la-Mère-de-Dieu sera le premier bâtiment cultuel orthodoxe construit en France.
Eglise orthodoxe grec à Marseille

1853 : première chapelle roumaine à Paris, située au 22 rue Racine.

1859 : consécration de l'église Saint-Nicolas-sainte-Alexandra à Nice (rue Longchamp), la première église russe en France.
Nice, église st-Nicolas-ste-Alexandra

1861 : - (11 Septembre) consécration de la cathédrale russe Saint Alexandre Nevsky, rue Daru, à Paris. Cette église était destiné non seulement aux russes mais à toutes la communauté orthodoxe. Elle fut financée par les dons des orthodoxes de Paris, russes, français, serbes, grecs ; de Russie de Nijni Novgorod au Tsar Alexandre II lui-même sur sa cassette personnelle. Chacun contribue suivant ses moyens, 20 centimes pour un étudiant grec de la Sorbonne jusqu’à 100 000 francs pour un mécène grec. Aux orthodoxes se joignent des catholiques et des protestants.
           - Cette même année, l'abbé René Guettée devient le premier prêtre orthodoxe français avec le nom de Vladimir.
           - Cette année est également publié par le père Joseph Wassilieff, prêtre de la cathédrale St. Alexandre de la Néva (rue Daru) et véritable fondateur de celle-ci, "le premier Manuel de prières orthodoxes en français et il organisa un chœur de chantres français qui resta celui de la cathédrale jusqu'en 1914." (In Un Précurseur, Wladimir Guettée, par Jean-Paul Besse, p.123).

Cathédrale saint-Alexandre-Nevsky
Père Vladimir Guettée (1816-1892)

1863 : consécration de la crypte de la Sainte-Trinité, Cathédrale st Alexandre de la Neva, rue Daru, à Paris. Mais ce n'est que 100 ans plus tard (en 1964), que cette crypte devint le lieux de culte d'une communauté francophone.

1867 : consécration de l'église de Saint-Alexandre Nevsky à Pau (18, rue Jean Réveil, Pau 6400).

1892 : consécration de l'église roumaine de Paris, rue Jean de Beauvais, achetée par l'état roumain en novembre 1882.
Cathédrale des sts Archanges (rue Jean de Beauvais)

1895 : consécration de la cathédrale grecque Saint Etienne, rue Georges Bizet, à Paris.
Cathédrale saint Stéphane (rue Georges Bizet)

1912 : inauguration de l'église Saint Nicolas le Thaumaturge à Nice. Décrite comme la plus belle église russe hors de Russie. Autres églises orthodoxes construites en France : Cannes (1894), Menton (1892), Biarritz (1900).
Nice: église st Nicolas

1916-1917 : après l'occupation du Dodécanèse par l'Italie, puis en 1923, après la catastrophe d'Asie Mineure, deux vagues d'immigration grecque. A partir de 1920, arrivée massive d'immigrés russes.

1918 : Te Deum solennel à la cathédrale saint Stéphane, rue Georges Bizet, pour la fin de la première guerre mondiale

1923 : installation à Paris du premier évêque orthodoxe, le Métropolite Euloge, à la cathédrale saint-Alexandre-de-la Néva (rue Daru).

1925 : consécration de l'église saint-Serge de Radonège (rue de crimée) ; et 1926 fondation de l'Institut de théologie orthodoxe (Institut Saint-Serge).

1927 : première liturgie célébrée en français, en l'église de l'Institut Saint Serge.
Suivra la fondation de la première paroisse francophone de la Transfiguration et sainte Geneviève ouverte, boulevard du Montparnasse à Paris.

1939 : première réunion, à l'église grecque de Paris, d'un Comité Inter-Orthodoxe réunissant les représentants des diverses églises orthodoxes de Paris. Un comité permanent sera créé en 1943 sur l'initiative de l'Archimandrite Théophile Ionesco, de l'église roumaine.

1944 : une première célébration solennelle réunissant les différentes communautés orthodoxes de la capitale a lieu, le 23 janvier, sous la présidence du Métropolite Euloge, exarque du Patriarche Œcuménique.

1949 : L'église orthodoxe roumaine des Saints Archanges à Paris, devient le siège d'un évêque avec la création d'un diocèse d'Europe occidentale par le métropolite Bessarion (Puiu).

1958 : naissance de la "Fraternité orthodoxe" pour le témoignage commun de l'orthodoxie en Europe occidentale.

1963 : l’église Saint Stéphane (rue Georges Bizet, Paris) est promue au rang de "cathédrale", et devient le siège de la Métropole orthodoxe grecque de France. Elle est le siège d'un évêché depuis 1953, date de l'élection de Mgr Mélétios évêque de Reggio, qui devient donc en 1963 premier Métropolite de France avec la cathédrale Saint Stéphane pour siège.

Printemps 1967 : création d'un Comité Inter-Épiscopal Orthodoxe permanent réunissant les évêques orthodoxes de France (alors huit), présidé par le Métropolite Mélétios, exarque du Patriarche Œcuménique.

1971 : 1er Congrès Orthodoxe, organisé par la Fraternité Orthodoxe en Europe Occidentale à Annecy. D'autres suivront tous les 3-4 ans depuis lors.

1983  : première visite à Paris de Sa Béatitude Ignace IV, Patriarche d'Antioche.

1995 : visite officielle de Sa Sainteté, Bartholomée 1er, Patriarche Œcuménique, en France (Paris, Lourdes, Marseille, Nice) et à Monaco.

1997 : transformation du Comité Inter -épiscopal Orthodoxe en Assemblée des Évêques Orthodoxes de France.

1999 : visite à Paris de Sa Béatitude Paul 1er, Patriarche de Serbie.

Octobre 2002 : Première célébration par les évêques orthodoxes de France d’un office orthodoxe des vêpres présidé par le métropolite Jérémie, président de l’Assemblée des Evêques Orthodoxes de France, à la Cathédrale Notre Dame de Paris, le dimanche 13 octobre 2002 à l’occasion de la fête de Saint Denys l’Aréopagite, fête patronale du diocèse (catholique) de Paris, à l’invitation de Son Eminence le Cardinal Jean-Marie Lustiger, Archevêque de Paris. Depuis, cette célébration est désormais une tradition annuelle.

Janvier 2003: Le 17 janvier 2003, première présentation officielle des vœux de l’AEOF à la présidence de la République Française. Une délégation de l’AEOF conduite par le métropolite Jérémie (président de l’AEOF et évêque titulaire de la Métropole grecque de France), accompagné de feu le métropolite Gabriel Saliby (métropolite grec-orthodoxe d’Antioche en Europe Occidentale du patriarcat d’Antioche), a été reçue en audience au Palais de l’Elysée par le président Jacques Chirac. « C’est un témoignage d’estime et de respect pour la religion orthodoxe » a déclaré le président Chirac à cette occasion dont les propos ont été rapportés par la porte-parole de l'Élysée, Mme Catherine Colonna.
Octobre 2003: Les responsables orthodoxes en France reçus à Matignon pour la première fois. Le Premier Ministre Monsieur Jean Pierre Raffarin a reçu le 30 octobre une délégation de l’Assemblée des Évêques Orthodoxes de France, conduite par son président le métropolite Emmanuel et composée de l’Archevêque Gabriel (de Vylder) (Archevéché russe - Exarchat du Patriarcat Oecuménique) et du Métropolite Joseph (Métropole orthodoxe Roumaine). « C’est la première fois qu’une telle rencontre a lieu, s’inscrivant dans la volonté du gouvernement de recevoir officiellement et régulièrement les responsables de toutes les religions en France » (dépêche de la revue Croire.com).

Octobre 2007: Visite officielle et pastorale de Sa Sainteté Alexis II patriarche de Moscou en France. Visite historique, première visite d’un primat de l’Eglise orthodoxe russe en France. Rencontre des évêques membres de l’Assemblée des Evêques Orthodoxes de France avec Sa Sainteté Alexis II pour rendre compte du travail de coopération et de concertation des évêques orthodoxes de France en faveur de l’unité de l’Eglise orthodoxe en France et pour s’entretenir avec lui de l’avenir de son organisation dans ce pays.

2008 : Naissance au ciel de l'archimandrite Denis Guillaume. Traducteur et compositeur infatigable des livres et offices liturgiques orthodoxe. Grâce auquel nous disposons de la totalité des livres liturgiques en Français, traduit lorsqu'il était encore catholique-romain. Il a composé également un certains nombres d'office à des saints occidentaux. Mémoire éternelle.

2009: Visite en France de Sa Béatitude Daniel, Patriarche de Roumanie.


Diverses sources dont : 1 , 2 , 3 ,....