vendredi 17 octobre 2014

Une interview de Bernard Le Caro


Sur Orthodoxologie: une interview très intéressante de Bernard le Caro à la revue serbe Geopolitika, dont nous aimerions souligner quelques passages :

2. Lorsque vous êtes devenu chrétien orthodoxe, à quel point étiez-vous conscient que vous reveniez à la maison – car, ne l’oublions pas, la France, votre patrie, était, à l’instar de l’Irlande, l’ornement de l’Occident orthodoxe, pleine de saints, depuis les martyrs de l’Eglise ancienne comme St Irénée, également un grand théologien, en passant par Ste Geneviève, saint Cassien le Romain, jusqu’aux ascètes des Gaules..

Je dois dire que cette conscience m’est venue un peu plus tard, même si c’est le commonitorium de St Vincent de Lérins qui, entre autres, m’a persuadé du manque de fondement du dogme papal. St Jean de Changhaï  a « donné le coup d’envoi » à la vénération des anciens saints qui en Occident même n’étaient plus vénérés, alors qu’il y a pratiquement, chaque jour, dans le calendrier, au moins un saint du territoire de la France actuelle, antérieur au XIème s. On peut ajouter à cela que plus de dix pour cent des communes françaises portent le nom d’un saint. Non seulement des saints de la Gaule ancienne, mais aussi des saints de toute l’Église universelle. Par exemple, ma commune natale porte le nom de St Germain de Constantinople. Sur les traces de St Jean, les orthodoxes russes de Grande Bretagne célèbrent désormais tous les saints des Iles britanniques, qui sont innombrables. Il en est de même en Suisse, où un office de tous les saints qui y ont vécu, est célébré annuellement par les paroisses orthodoxes russes. Il y a même maintenant  un office en slavon qui leur est dédié ! Cette vénération des saints anciens a donné une nouvelle vie à leurs reliques : les orthodoxes célèbrent des offices devant celles-ci, alors qu’elles étaient souvent à l’abandon. Et lorsque je dis une nouvelle vie, ce n’est pas théorique. Alors que je m’étais rendu avec un prêtre grec dans une église contenant les reliques d’un saint du Vème siècle, le prêtre les prit dans sa main, et une odeur très forte s’en dégagea. Vous disiez, que je suis « rentré à la maison, dans l’Église orthodoxe ». Mais on voit aussi que les saints, rentrant dans l’Église orthodoxe rentrent aussi à la maison. Il y a encore en France des reliques de grands saints, dérobées lors du sac de Constantinople, et ces reliques étaient également oubliées. C’est le cas, par exemple, du Crâne de St Jean Baptiste qui se trouvait relégué dans la sacristie de la cathédrale d’Amiens, et qui est maintenant accessible au public. Et cela grâce aux milliers d’orthodoxes qui viennent depuis la Russie le vénérer. Il en est de même des reliques de la sainte impératrice Hélène, à Paris. Les orthodoxes célèbrent souvent des offices d’intercession devant ces reliques. Il y a à cet égard un grand changement dans le clergé catholique-romain, qui laisse volontiers les églises à disposition des orthodoxes. Certains d’entre eux voient dans l’Église orthodoxe l’Église primitive, même s’ils ne peuvent faire le pas…

3. La France, au cours des siècles, a combattu courageusement l’enseignement sur l’infaillibilité papale. Parmi les grands témoins de la vérité à ce sujet, il y a entre autres l’archiprêtre Vladimir Guettée qui, au XIXème siècle est devenu orthodoxe et a écrit un livre, à ce jour insurpassé, sur le primat papal. Dîtes-nous quelque chose à ce sujet.  

Le Père Vladimir Guettée était un solide historien qui aimait la vérité. C’est son étude de l’histoire de l’Église qui l’a conduit à l’Orthodoxie. En examinant scrupuleusement et impartialement les arguments en faveur de la primauté papale, il en est venu à la conclusion que l’Église qui avait préservé l’enseignement des Apôtres et des Pères était l’Église orthodoxe. Son livre « la Papauté schismatique », traduite ensuite en plusieurs langues, est une étude exhaustive : siècle par siècle, il démontre qu’un « évêque des évêques » n’a pas existé dans l’Église du premier millénaire. Fait étonnant, St Théophane le Reclus conseillait la lecture du livre du père Guettée à ceux qui en Russie lisaient le français. Lui-même parlait couramment cette langue. Dans sa réclusion, il lisait la revue « L’union chrétienne » dirigée par Guettée. Maintenant, s’il est vrai qu’au cours du second millénaire, les Français ont lutté contre l’absolutisme papal, il faut encore souligner qu’au cours des premiers siècles la Gaule avait conservé de façon éclatante l’ancienne ecclésiologie. Je citerai les conciles de la Gaule du Vème siècle : l’un de ceux-ci condamna une hérésie locale et demanda au pape de Rome, non pas son opinion, non pas de confirmer la décision…  mais de communiquer celle-ci aux autres Églises !

4. Vous vivez depuis plusieurs décennies en Suisse et appartenez à l’Eglise russe hors frontières du Patriarcat de Moscou. Vous avez fourni votre apport à l’union de l’Eglise russe hors-frontières et du Patriarcat de Moscou. Quelle est votre expérience de l’Orthodoxie à l’étranger et comment s’est passé le processus d’union après la chute du communisme ?
[...]
Quant à moi, j’étais chargé de toute autre chose : évoquer la mission de l’Orthodoxie en Occident. J’ai rappelé que selon St Jean de Changhaï, la diaspora russe avait pour mission de ré-évangéliser – selon la foi droite – l’Occident. J’ajouterai que ce n’est pas seulement la tâche des Russes, mais de tous les autres peuples orthodoxes présents en Occident !
[...]

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